Libellula depressa (Linnaeus, 1758)

Libellula depressa mâle, Beaupréau (France-49),05/05/2011
Libellula depressa mâle, Beaupréau (France-49),05/05/2011
Description – Identification

Les mâles matures de Libellula depressa, la Libellule déprimée, sont une cible fréquente des naturalistes du Printemps.
La face et les yeux sont bruns, comme le thorax qui porte 2 bandes ante humérales claires. Les pattes sont sombres, l’abdomen aplati est bleu-ciel avec des taches jaunes latérales variables (restes de jeunesse…) sur les premiers segments. Les ailes portent une membranule blanche et la marque basale sombre caractéristique du genre Libellula étendue en triangle aux postérieures, limité à une bande aux antérieures. Ils mesurent 39 à 48 mm.
Il est difficile de les confondre avec une autre espèce
Les mâles immatures sont jaunes, tout comme les femelles.

Les femelles sont jaunes avec une bande ante humérale claire et à part l’absence de la coloration bleu de l’abdomen, elles sont copies conformes des mâles et donc encore plus des mâles immatures. Seuls les appendices anaux nettement écartés et l’absence d’organes sexuels secondaires sous le S2 permettent de la différencier même si son abdomen est encore plus large.
Les très vieilles femelles peuvent se doter d’une pruinosité bleu foncé sur l’abdomen.
On peut les confondre… avec de gros « frelons », cela a souvent été rapporté.

Habitat – Ecologie

C’est une espèce qui rendait souvent visite à ma petite mare ; elle apprécie toutes les eaux dormantes, comme les étangs petits et grands, les mares, marais, les fossés, les simples trous d’eau et même les eaux faiblement courantes.

Elle est pionnière, et fortement colonisatrice, une des premières observées après le creusement de mon bassin de jardin. Je la vois malheureusement beaucoup moins souvent maintenant que les poissons sont âgés (grands !) et que les rives sont très végétalisées. J’avais d’ailleurs dressé des tuteurs sur les berges afin qu’elle s’y pose, car les mâles se perchent pour surveiller leur territoire et fondre à grande vitesse sur leurs concurrents, avant de revenir au même poste.
Le vol est très rapide avec des changements de directions fulgurants et des vols stationnaires soudains qui la rendent difficile à suivre.

L’accouplement est très bref, en vol, rarement vu donc et encore plus rarement photographié…
Pour pondre, les femelles frappent leur abdomen dans l’eau, avec de fréquents vols stationnaires, comme si elles choisissaient leur lieu de ponte (on peut ainsi les photographier en vol), le mâle reste parfois en surveillance.
Les œufs, nous dit Paul-André Robert, mesurent 0.3 à 0.5 mm sur 0.6 à 0.8 mm, ce qui en fait d’assez gros œufs. Encore une fois, je ne peux que conseiller de lire les pages d’Histoire Naturelle que cet auteur a consacré à l’espèce. Il n’existe pas d’autres descriptions aussi magnifiquement documentées.
Les larves vont passer un an (le plus souvent) ou deux immergées, mais sont capables de résister à une exondation, voire de changer de lieu pour en trouver un plus favorable, à proximité immédiate.

Période de vol

On rencontre facilement la Libellule déprimée en mai, encore plus en juin, mais le réchauffement climatique nous apporte tous les ans des records, tant pour les dates précodes que tardives …

Libellula depressa mâle, Saint Philbert-en-Mauges (France-49), 28/05/2012
Libellula depressa mâle, Saint Philbert-en-Mauges (France-49), 28/05/2012
Distribution géographique

Libellula depressa est présent dans tous les départements français, plus fréquent en plaine qu’en montagne, mais on le voit voler largement au-dessus de 2500 m.
Sa répartition mondiale le limite essentiellement à l’ouest de l’Europe, de l’Espagne et l’Angleterre au sud de la Scandinavie, à l’est il atteint la Russie centrale, le Kazakhstan et l’Iran où il est très disséminé, et redevient beaucoup plus abondant à l’ouest de la Turquie. Il n’est pas présent en Afrique du Nord.
Atlas dynamique des Odonates de France.
IUCN Red List où il est considéré comme stable.

Étymologie

Libellula nous ramène à l’étymologie même du mot « libellule » et il faut revenir au XVIe siècle avec le moine zoologiste Guillaume Rondelet pour comprendre l’origine de ce terme. Il a remarqué que la forme des larves aquatiques de certaines libellules, en l’occurrence celles des zygoptères, ressemblait à celle du corps du requin marteau (Sphyrna zygaena).
Ce poisson avait reçu différents noms vernaculaires dont celui de Libella par analogie avec la forme d’un niveau de charpentier (appelé autrefois libella), mais il faut tout de même une bonne dose d’imagination pour y trouver une ressemblance…
Guillaume Rondelet a donc nommé ces larves Libella fluviatilis (1).
Ce n’est qu’en 1758 que Linné fait franchir le pas et que Libella devient Libellula sans doute pour introduire une notion de petite taille par le suffixe diminutif –ule. Et le grand naturaliste utilise le terme Libellula pour nommer tous les odonates alors connus.

Depressa, du latin deprimo, presser de haut en bas, en rapport avec la forme aplatie de l’abdomen.

Le nom français n’accorde donc aucune importance à la santé mentale de cet odonate et ne s’intéresse qu’à la forme aplatie de son abdomen.

-1- The scientific names of the Odonata in Burmeister’s ‘Handbuch der Entomologie, Heinrich Fliedner

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