Description – identification
Coenagrion ornatum, l’Agrion orné, est à distance copie-conforme de Coenagrion mercuriale qu’il remplace dans l’est de l’Europe. Et il est effectivement difficile à différencier de son cousin sur le terrain.
Le mâle mesure environ 30 mm, il est un peu plus sombre que C. mercuriale et porte comme lui sur le 2° segment abdominal, un dessin combinant un pied et deux branches, dessin assez indéfinissable, en chauve-souris, en papillon, en verre à pied (à fond pointu…) ou en As de pique doté de bras attachés ou non. Les segments S3 et S4 (voire S5) portent des motifs noirs très effilés vers l’avant, plus élancés que ce ceux de son cousin.
De près, les différences sont assez nombreuses :
– les taches postoculaires sont (normalement) fortement indentées en arrière (celles de C. mercuriale sont plus petites et arrondies)
– le pronotum qui porte 2 larges taches latérales est trilobé, avec un petit lobe postérieur à marge entièrement colorée
– les motifs sont très effilés sur S3 et S4
– les appendices anaux discrets, les supérieures très courts, les inférieurs clairs, alors que ceux de C. mercuriale, très visibles, sont sombres et de longueurs égales.
Les femelles sont bleues (Paul-André Robert cite cependant des femelles vertes) et se différencient des rares C. mercuriale bleues par leurs imposantes taches postoculaires spectaculairement indentées postérieurement. Le pronotum est également bien différent, largement échancré en arrière pour laisser un petit lobe postérieur à marge bleue légèrement encoché en son centre.
Elles sont par contre vraiment proches des femelles de C. pulchellum qui peuvent montrer des taches postoculaires indentées, un pronotum moins échancré avec un lobe central plus massif et non indenté. Les femelles Coenagrion ornatum présentent des motifs abdominaux très effilés et pointus.
Certaines femelles peuvent être sombres, presque sans bleu à la base des segments, mais toujours avec des taches postoculaires typiques.
Habitat et distribution géographique
Il ne se plaît que sur les ruisseaux ou ruisselets, éventuellement pâturés, les fossés, les suintements, très ensoleillés, les eaux très peu profondes et à faible débit. Il aime ces courants d’eau pérennes dans des espaces ouverts, mais non loin des haies bocagères, avec une végétation variée qui peut comporter, comme ici, de la Menthe et des Iris des marais. En ses choix, il partage l’habitat de C. mercuriale, souvent en bien plus grand nombre sur ces sites.
Il est rare sur toute son aire de distribution et en France, il est quasi limité à la Bourgogne, surtout la Nièvre, le sud de l’Yonne, l’ouest de la Côte-d’Or, et, du nord au sud, la grande moitié ouest de la Saône-et-Loire. Il a disparu d’Alsace.
Vers l’est de l’Europe, il « remplace » C. mercuriale et s’étend du nord de l’Italie à la Pologne vers le sud-est jusqu’à l’Iran à travers la Turquie.
Atlas Dynamique des Odonates de France
IUCN Red List
Période de vol
En France, le pic des observations est en juin, avec des données avant la mi-mai et jusqu’au milieu de juillet. Il est donc rare et la durée de vie des imagos est courte !
Comportement – Écologie
Il est rare, donc peu observé et sa biologie reste largement inconnue.
Dans les Libellules de France, Belgique et Luxembourg, Daniel Grand et Jean-Pierre Boudot pensent que les œufs peuvent passer l’été dans la vase des ruisselets desséchés et n’éclore qu’à l’automne.
Pour ce que j’en ai vu, je dirais que son comportement est tout à fait similaire à celui de C. mercuriale, ou même de C. puella, alternance de longues errances dans la végétation à la recherche de femelles, où on les voit parfois « picorer » la végétation pour y capturer de minuscules proies.
Étymologie
Coenagrion est formé des 2 mots grecs Koinos – commun et Agrios – vivant dans les champs, sauvage. Ce nom de genre a été formé de façon complexe lorsqu’il a fallu rediviser les familles existantes, de nouvelles espèces étant découvertes, le terme « agrion » s’avérant insuffisant.
Ornatum, du latin –ornatus qui signifie –orné, décoré et s’applique à l’élégance des motifs effilés de son abdomen.
Je tiens à remercier la SHNA-Ofab, Société d’Histoire Naturelle d‘Autun et l’observatoire de la faune de Bourgogne, en particulier Etienne Hubert, grâce à qui j’ai pu découvrir cette espèce.