Nous avons fréquemment rencontrés Nannophlebia eludens dans le Territoire du Nord en décembre, beaucoup moins dans le Nord du Queensland en décembre. Mais c’est toujours dans des conditions difficiles, soit en forêt avec peu de lumière, soit en limite de bois ou de forêt, l’insecte à la lumière ou au soleil avec un fond sombre derrière.
C’est un genre très spectaculaire, avec des yeux verts magnifiques, un abdomen très fin fortement arqué (les Anglo-Saxons l’appellent Elusive archtail), des appendices anaux blancs portés par des derniers segments très dilatés, comme on le voit très bien ci-dessous à droite.
Il mesure environ 28 mm pour un abdomen de 20 mm.
N. eludens mâle, Australie (NT), Kubara Walk, 29/04/2022
Il y a 4 Nannophlebia en Australie, et au calme, sur l’écran de l’ordinateur, ils ne sont pas difficiles à différencier. Nannophlebia eludens s’identifie par la présence des marques jaunes au milieu des segments 4,5 et 6 et son pattern thoracique unique.
Il y aurait 2 formes de femelles ; l’une avec une marque jaune sur le 7° segment (seule photo ci-dessous à droite), une autre sans cette marque. Ces femelles avec une marque jaune supplémentaire par rapport aux mâles sont décrites également par Tillyard, mais il leur donne un vertex jaune, ce qui n’est pas le cas ici. Mais c’est ce qu’on trouve sur le Web, en particulier sur la partie australienne de Inaturalist. Vraiment étonnant …
Nannophlebia eludens femelle, Australie (NT), Howard Springs, 04/05/2022
Il est endémique d’Australie et on le rencontre sur la façade est du Queensland, le nord du Territoire du Nord, et l’extrême nord-est de l’Australie-Occidentale.
Ici, sur l’Atlas of Living Australia.
Ci-dessous à gauche, une situation bien classique ; un mâle a terminé sa course et sa carrière, dans une toile d’araignée. Évidemment, ces araignées sont des spécialistes des milieux humides, et capturer des odonates maladroits est l’occasion de faire un beau repas…
L’autre photo montre quelque chose que je n’avais jamais vu ; 2 espèces sont piégées sur le fruit d’un arbre enduit d’une substance collante. Quand je les ai observés, ils étaient tous les 2 morts, sans doute pas depuis longtemps sinon ils auraient déjà été recyclés. Il s’agit d’une femelle Nannophlebia eludens et d’un Chorismagrion risi. On note également la présence d’une exuvie au sommet du fruit.
L’arbre est Ceodes (ex Pisonia) umbellifera (2), de 10 à 20 m de haut qui produit des akènes d’où exsude une substance collante ; ce processus permettrait de coller les graines aux insectes ou aux oiseaux et ainsi de les disperser. Cependant, la « colle » est tellement puissante qu’elle a valu au végétal d’être nommé arbre à glu en anglais (birdlime tree) et que les autochtones s’en servait pour capturer de petits oiseaux…
Nannophlebia eludens piégé par un bourgeon collant, Australie (FNQ), Henrietta Creek, Wooroonooran, 12/12/2022
Nannophlebia (1) est composé d’un mot grec signifiant nain, et de phlebia, pour veine (nervure). Sélys a créé ce nom de genre en signalant qu’il est très proche de Nannophya à l’exception de la veine basale.
Eludens est le participe présent du verbe latin eludo qui signifie s’évader et Tillyard explique qu’il l’a nommé ainsi en raison de la façon dont il s’évade en zigzag quand on le dérange de son perchoir.
-1- The Naming of Australia’s Dragonflies, Ian Endersby & Heinrich Fliedner, Busybird Publishing 2015
-2- Pisonia umbellifera, Wikipedia