Les Ceriagrion sont immédiatement reconnaissables par leur habitus, leur thorax aux sutures peu marquées et surtout, à leurs derniers segments fléchis vers le bas. Ceriagrion aeruginosum (Redtail) ne fait pas exception, il est commun et nous l’avons rencontré environ un jour sur 2.
Il se plait en bordure de mare ou sur les parties lentes des rivières et des ruisseaux, mais presque toujours en sous-bois, et donc fréquemment à l’ombre.
Vu le grand nombre de sujets rencontrés, il n’est pas étonnant d’avoir rencontré un sujet déformé, ou mal formé. Quelle est la cause d’une telle anomalie, nous ne le saurons jamais, mais en tout cas ce mâle aura bien du mal à trouver une compagne…
Je suis toujours heureux de rencontrer des scènes de la « vie » des odonates que j’observe, notamment des actions de prédation. Mais ici, quelle est la proie ? Une mouche, soyons rigoureux, un diptère dont j’ai cru, sans confirmation, et par analogie avec ce que j’ai observé dans mon département, reconnaître la famille. C’est sans doute un Sarcophagidae, avec ses yeux rouges, son damier sur l’abdomen et son thorax portant des lignes alternées claires et sombres.
J’estime la taille de la proie à environ 8 mm, en la rapportant à celle du Ceriagrion dont la longueur totale est de 45 mm.
Les femelles beaucoup plus ternes sont un peu étranges par l’aspect mat et très cireux de leur thorax verdâtre.
Que ce soit pour les mâles ou les femelles, il n’y a pas de souci d’identification en Australie, il n’y a qu’une seule espèce de Ceriagrion. Et c’est heureux, car en Afrique ou en Asie, il faut examiner les appendices anaux pour les différencier ; or comme on peut le vérifier sur les photos plus haut, les appendices sont particulièrement courts et donc difficiles à photographier ou à comparer.
Redtail femelle, Australie (NT), Ubirr, 01/05/2022 pour les 3 autres
En Australie, sa distribution le limite au Nord-Est ; les régions côtières du Queensland, le Nord du Territoire du Nord, et la région côtière de l’Australie-Occidentale.
Mais on le trouve aussi en Indonésie, aux Moluques, et en Nouvelle-Guinée.
Dans Ceriagrion, on retrouve le classique Agrion créé par Fabricius (1775) pour désigner tous les Zygoptères et qui vient d’un mot grec signifiant sauvage, sans doute pour indiquer, d’après Fliedner (2006), qu’on trouve ces insectes dans les champs et non dans un environnement domestique.
La première partie du nom de genre vient d’un mot latin, Cerinus, signifiant couleur cire, en rapport, selon (1) avec la coloration jaunâtre ou verdâtre. Personnellement, je pense qu’il s’agit, plutôt que d’une question de couleur, d’une notion de texture ; pour moi, c’est réellement l’aspect cireux du thorax qui a été retenu pour désigner le genre.
Aeruginosum est un mot latin signifiant rouillé et se réfère à la coloration de la partie supérieure du corps.
Ceriagrion aeruginosum mâle, Australie(NT), Rum Jungle Lake, 14/04/2022
-1- The Naming of Australia’s Dragonflies, Ian Endersby & Heinrich Fliedner, Busybird publishing.
Toujours aussi passionnant ! Merci Benoît !