Le magnifique Prodasineura verticalis a été décrit par Selys (1) sous le nom de Alloneura verticalis et semble-t-il de Alloneura humeralis, puisque certains considèrent maintenant que ces deux espèces n’en font qu’une.
Il existe en effet une incertitude sur la validité de l’espèce Prodasineura humeralis, parfois considérée comme une sous-espèce [!] de P. verticalis, sous le nom de Prodasineura verticalis humeralis. La tendance actuelle est de penser que humeralis n’est qu’une forme de Prodasineura verticalis. C’est à dessein que je n’utilise pas le mot sous-espèce qui, pour moi, n’a aucun sens.
J’avais rencontré Prodasineura humeralis en 2013 en Malaisie, et les pages que je lui ai consacrées n’ont pas été éditées ; j’attends une éventuelle confirmation officielle de la synonymisation des espèces pour en changer le nom.
On note bien sûr la similarité des couleurs et des motifs thoraciques, avec des bandes colorées cependant plus fines et discrètes, mais l’absence quasi totale de marque colorée sur le pronotum et de celle de la bande colorée sur le vertex (sauf pour de rares individus…).
Mais Prodasineura verticalis a été décrit à partir d’un sujet de Bornéo ; il est donc curieux qu’à Bornéo, on ait ce très commun Platycnemididae, qu’en Malaisie péninsulaire, on trouve Prodasineura humeralis et que dans le nord de la Thaïlande, on retrouve Prodasineura verticalis… Il faut aussi savoir que d’après des données génétiques non publiées encore, ces deux espèces sont faiblement séparées (2). Ne compliquons pas trop, mais Prodasineura autumnalis est également très proche. Mais Dow & al. (2) conservent ces trois espèces séparées, je vais donc les suivre.
Il est certain que le genre entier, 39 espèces, est en grand besoin de révision.
Selys (1) lui donne un abdomen de 20 mm, ce qui est très étonnant et semble une erreur de retranscription (?). Asahina (3) donne une longueur d’abdomen de 28-29 mm, Singh (4), en Inde, 29 mm. Sa longueur totale atteint donc à peine 35 mm et son abdomen extrêmement fin lui donne, en anglais, le nom de Orange-Striped threadtail.
Il fréquente les suintements, les ruisseaux et petites rivières en forêt, adoptant fréquemment, seul ou en couple, le vol stationnaire, qui force le photographe à tenter de le saisir en vol ; malheureusement l’ombre est là pour faire respecter son intimité ! Nous le l’avons rencontré qu’une seule fois sur un ruisseau menant à la chute de Wang-Bua-Ban-Pha-Ngoep, à 450 mètres d’altitude (exactement à l’emplacement de la flèche rouge).
Sa distribution est suspecte, car elle englobe ses sous-espèces (d’autres existent en plus de celle mentionnée) et peut-être d’autres espèces cachées dans ce qu’on pourrait appeler le complexe Prodasineura verticalis : elle est rapportée de l’Inde à Bornéo, jusqu’au sud de la Chine.
IUCN Red List.
Étymologie
Prodasineura (Cowley, 1934) (2) ; je ne suis pas parvenu à trouver le document dans lequel Cowley sépare ce genre des Disparoneura (Selys, 1860). Disparoneura signifie « nervation à part » pour insister sur la particularité de celle-ci et Cowley conservant cette idée, a créé cette anagramme de Disparoneura, car ce genre présente une nervation très proche.
Verticalis, du latin verticalis, signifiant sommet, lui-même dérivé de vertex, sommet de la tête, auquel on a ajouté le suffixe alis, pour notifier la dépendance, l’appartenance. Et Selys écrit, en italique d’ailleurs : « Une bande rouge au vertex, traversant l’ocelle antérieur.« , détail qui le différencie d’espèces proches.
1- Selys, 1860 – Synopsis des Agrionines – Dernière légion : Protoneura, p. 453.
2- Dow RA, Choong CY, Grinang J, Lupiyaningdyah P, Ngiam RWJ, Kalkman VJ. Checklist of the Odonata (Insecta) of Sundaland and Wallacea (Malaysia, Singapore, Brunei, Indonesia and Timor Leste). Zootaxa. 2024 May 31;5460(1):1-122.
3- Dr Syoziro Asahina, 1993 – A List of the Odonata from Thailand (Parts I – XXI), Bro. Amnuay Pinratana, 1993.
4- Field Guide to the Dragonflies & Damselflies of Northwest india, Dheerendra Singh – Bishen Singh Mahendra Pal Singh – 2022