Indolestes birmanus est un des quatre Indolestes de Thaïlande, un des 35 que compte actuellement le genre. Il est facile à séparer des autres par la forme très spécifique de la large bande antéhumérale noire qui porte trois échelons. Selys (1) n’a pas réellement fait de description de l’espèce ; il l’a supposée différente de Lestes divisa en écrivant : « il existe, immédiatement après la suture humérale, sur les côtés du thorax, une bande assez large, dont le bord forme, en dehors, en échellons [sic] trois angles, à peu près comme chez la Lestes colesonis [maintenant Austrolestes colesonis] de Nouvelle-Zélande ».
Il avait alors appelé cette nouvelle espèce Lestes birmana ; à cette époque, les Lestes étaient considérés comme féminins, ils sont devenus masculins et le birmana est devenu birmanus.
Sélys précise que l’abdomen mesure 30 mm, ce qui donne une longueur totale de 36.8 mm.
Nous l’avons rencontré à environ 1500 d’altitude, dans une partie marécageuse et boisée, le long d’une mare qui nous a révélé de très bonnes surprises. Précisément tout au fond de cette photo, là où Chris (à droite sur la photo), trouvera Sarsaeschna pramoti !
Nous n’avons rencontré Indolestes birmanus que sur ce site.
Jusqu’à ce que j’aperçoive assez récemment (sur Facebook) des photos d’un Indolestes sp., je n’avais pas pris conscience que je connaissais un autre genre que Sympecma (Lestidae aussi) se posant avec les quatre ailes jointes, du même côté de l’abdomen. J’avais évoqué ce détail à ce moment sur le groupe « Dragonflies of Thailand » sans éveiller de curiosité notable. Il semble cependant que tous les Indolestes suivent ce comportement, par exemple Indolestes alleni ou tenuissimus en Australie, ou encore I. peregrinus au Guizhou (Chine).
En Europe, pour Sympecma fusca que je connais bien, on invoque un souci de thermorégulation ; l’espèce, survivant à l’hiver sous forme d’imago affronte des conditions peu favorables et placer ses deux ailes toujours du côté opposé au soleil, permet d’exposer l’abdomen au soleil et de le réchauffer.
Il est cependant difficile d’évoquer les rigueurs hivernales dans des zones tropicales ou sub tropicales…
Son aire de distribution est relativement incertaine en raison du fait qu’il a été considéré un temps comme une sous-espèce de Indolestes gracilis. La validité de l’espèce a été actée dans la publication de Kosterin et Poggi en 2015 (2).
Il est certainement présent en Thaïlande et au Myanmar, peut-être dans le sud de la Chine (Yunnan), mais pas au Vietnam…
Indolestes birmanus est une rareté ; sur iNaturalist, on ne trouvait que neuf photos avant notre prospection, dont une seule photo de femelle. Les photos de tandem sont donc l’occasion d’observer que les femelles présentent globalement les mêmes motifs, en particulier sur le thorax ; la différence essentielle, quand on fait abstraction des appendices anaux et du S2 est l’épaisseur de l’abdomen de la femelle.
Indolestes (3) ; du latin indus, indien + lestes : les 3 espèces que Fraser a placées dans ce nouveau genre de Lestidae avaient été collectées en Inde. Lestes a été créé par Leach (1815) et vient du mot grec ληστησ qui signifie voleur ou pirate, très vraisemblablement en raison de la forme des appendices anaux qui évoque le coutelas courbé des pirates (4).
Birmanus, est une latinisation de birman, pour natif de Birmanie, qu’on appelle souvent Myanmar. En effet, l’holotype, le premier individu décrit, a été capturé à Puepoli, actuellement Papun, dans l’état de Kayin au Myanmar.
1- Selys, 1891 – Odonates de Birmanie, Viaggio di Leonardo Fea in Birmania e regioni vicine, p 495.
2- Kosterin & Poggi,2015 – Taxonomical notes on Indolestes Fraser, 1922 (Lestidae, Zygoptera).2. Indolestes birmanus (Selys, 1891) is bona species.
3- The Naming of Australia’s Dragonflies, Ian Endersby & Heinrich Fliedner, Busybird publishing.
4 – Why did William Elford Leach call a small damselfly a « pirate » ? – Revisiting the etymology of the genus Lestes (Odonata: Lestidae), Matti Hämäläinen & Heinrich Fliedner, Notulae odonatologicae 10(1) 2023:8-16