C’était la quatrième fois que je rencontrais Brachydiplax chalybea, après le Laos, le Cambodge et la Malaisie. Mais c’est la première fois que je réussis à le voir vraiment de profil, là où il fait voir son thorax si particulier. Il m’a toujours semblé commun, même si je n’avais jamais pu l’approcher de très près.
Et, si en Thaïlande, nous avons prospecté des dizaines de sites, nous ne l’avons rencontré que sur 2 sites voisins, à Chiang Mai, c’est-à-dire, en plaine et sur des eaux stagnantes. C’est son milieu ordinaire, constitué d’étangs, lacs, fossés, mares où il occupe les berges bien végétalisées.
Il est très territorial et se met en évidence par son activité permanente.
Il mesure 33 à 35 mm, mais sa taille est apparemment très variable, c’est du moins ce qu’en dit Selys (1) qui avait même créé une espèce appelée B. maria (1878) pour les grands sujets de Nouvelle-Guinée et de Java par rapport aux petits des Philippines. Mais ayant trouvé des sujets de taille intermédiaire, ils sont tous revenus dans la case B. chalybea. Cependant, si l’espèce est connue à Java, elle ne l’est pas en Papouasie-Nouvelle-Guinée, à ma connaissance, où l’on rencontre ses deux cousins B. duivenbodei et denticauda.
En anglais, il prend le nom de Blue dasher ; il est à noter que c’est aussi le nom vernaculaire de Pachydiplax longipennis, un Libellulidae américain…
En Thaïlande, on ne peut guère le confondre qu’avec Brachydiplax farinosa, leur cousin B. sobrina étant rare. Mais B. farinosa, comme B. sobrina d’ailleurs, ne montre pas cette coloration brune sur la face latérale du thorax et pas de tache alaire basale ambrée aux ailes postérieures.
Il compte également moins de nervures anténodales que V. farinosa, 6 ou 7 contre 8 ou 8.
Sa distribution est très étendue, de l’est de l’Inde au Japon, il atteint au sud Java et le Sulawesi.
IUCN Red List
Les femelles, très différentes des mâles, sont rarement vues en dehors des actions de ponte, c’est la première fois que j’en observe.
Mais le plus surprenant pour moi dans ces photos de femelle en ponte est la couleur des œufs. On les voit ci-dessous sur ce très mauvais agrandissement ; ils sont verts et semblent translucides !
Étymologie (2)
Brachydiplax : brachy est un terme grec signifiant court et effectivement les odonates de ce genre sont petits, en particulier leur abdomen semble court. Diplax est une construction des deux mots Grecs ; dis signifiant double et plax se rapportant à toute chose plate et large, car la partie postérieure du prothorax des odonates de ce genre montre 2 lobes semi-circulaires ; Diplax est d’ailleurs un nom de genre non valide, créé par Charpentier en 1840 pour décrire un Sympetrum, car il ignorait que Newman, l’avait déjà décrit sous le nom qui est resté, antériorité oblige.
Mais, lorsque Brauer a eu besoin de créer de nouveaux genres, il a décidé d’utiliser l’élément –diplax pour indiquer qu’il s’agissait de Libellulidae, quelle que soit la forme de leur prothorax.
Chalybea, du latin chalybeus, qui signifie ferreux, couleur de fer, se référerait à la coloration du thorax : » thorax, derrière les pattes, au milieu, brun noirâtre ».
1- Selys, 1889 – Odonates de Sumatra comprenant les espèces recueillies à Pulo Nias par M. le Dr. E. Modigliani
2- Fliedner, 2020 – The scientific names of Brauer’s odonate taxa, Journal of the International Dragonfly Fund, 148.