Argia huanacina est un des 146 Argia pour l’instant connus sur le continent américain. C’est dire si l’identification peut être difficile. Heureusement, nous n’avons rencontré que cinq de ces « Dancers », leur nom de genre en anglais.
Pour être un bon odonatologue, il faudrait les identifier par leurs appendices anaux, encore que pour celui-ci, on les dit très proches de ceux de A. Selysi ; par chance, ce dernier n’est pas présent dans cette partie de l’Amérique du Sud.
Nous n’avons contacté l’espèce qu’à deux reprises, sur la Terre ferme, la zone de forêt non inondable, qui offre une faune et une flore vraiment différentes de ce que nous a montré le reste de notre séjour. Il se tenait au-dessus ou tout près de ruisseaux en forêt, dans des zones bien éclairées. Nous n’avons eu le droit qu’à un seul mâle, mais plusieurs femelles.
Ci-contre, une très mauvaise photo du biotope, qui rend la vie difficile aux appareils photos, mélange de zones sombres et de zones ensoleillées (nous sommes proches de l’équateur). L’eau est teintée par les matières en décomposition, mais presque cristalline par rapport à celle de nos lodges, plus café au lait, puisqu’elle vient directement de la rivière.
Les femelles sont assez faciles à identifier par la forme de la tache triangulaire sur le pronotum et celle des taches sur les deux derniers segments. Il est toujours satisfaisant et rassurant de voir les femelles en tandem, on s’assure ainsi de leur identité !
Förster qui l’a décrit dans Beiträge zu den Gattungen und Arten der Libellen nous dit qu’il mesure 33 mm.
Sa distribution le limite à l’est du Pérou et de l’Équateur, à la Colombie, à la Bolivie et au Brésil. C’est une espèce rarement vue, qui n’a que cinq observations sur Inaturalist à cette date, si on enlève les nôtres…
IUCN Red List
Dans la mythologie grecque, Argia (1) est le nom de plusieurs personnages féminins ; il ne faut pourtant pas chercher de lien, et il semble plutôt que Rambur ait choisi un nom de genre aussi près que possible de Agrion, dont la nervation, dit-il, est similaire : « par le ptérostigma et les deux nervules du premier espace costal, ils se rapprochent des Agrion”.
Pour huanacina, je n’ai pas trouvé de piste, rien n’est mentionné dans la description de Förtser.
La recherche sur le Web est « parasitée » par… une sauce nommée huancaina (anagramme très proche du nom d’espèce, il suffit d’inverser deux lettres), qui signifie « sauce de la ville de Huancayo », cité proche du Rio Madre de Dios, ou a été découvert l’holotype… Je n’ose pas écrire qu’il est possible qu’une faute d’orthographe ait été commise lors de la retranscription.
Les Américains se contentent de l’appeler Huanacina dancer.
1- The Scientific Names of North American Dragonflies, Heinrich Fliedner, Ian Endersby – Busybird Publishing 2019