Argia euphorbia, Coenagrionidae, fait partie de ces Dancers (nom du genre Argia en anglais) aux ailes fumées, un des 28 (!) du Pérou ; comme ceux aux yeux rouges, ils font partie des plus spectaculaires. Il est facile à identifier parmi les cinq espèces que nous avons rencontrées durant ce séjour de prospection, c’est le seul à associer ailes fumées et coloration sur S8 et S9.
Comme le montrent les photos ci-dessus et ci-dessous, il est quelque peu variable, surtout en ce qui concerne la bande antéhumérale convexe vers le bas, qui est plus ou moins complète. Lorsqu’elle est complète, il est très proche de A. fumigata, que je n’ai jamais rencontré et qui n’est pas présent au Pérou. Il est aussi proche de A. oculata, qui ne serait présent qu’au sud du Pérou.
Il mesure environ 33 mm pour un abdomen de 25.5.
Nous l’avons rencontré à proximité ou sur les rives de petits ruisseaux, en forêt humide, dans des zones bien éclairées.
C’est une espèce rare pour laquelle il y a peu de données, la distribution est donc forcément incomplète. Le mieux est de faire confiance aux spécialistes mondiaux du genre que sont Garrison et Von Ellenreider : « Présent le long des franges ouest et sud-ouest du bouclier guyanais et du bassin amazonien s’étendant à l’ouest jusqu’à l’Équateur et au Pérou et au sud dans l’État de Rondônia, au Brésil (2). »
IUCN Red List
Dans la mythologie grecque, Argia (1) est le nom de plusieurs personnages féminins de la mythologie grecque ; il ne faut sans doute pourtant pas chercher de lien et il semble plutôt que Rambur ait choisi un nom de genre aussi près que possible de Agrion, dont la nervation, dit-il, est similaire : « par le ptérostigma et les deux nervules du premier espace costal, ils se rapprochent des Agrion”.
Argia euphorbia mâle, Pérou, ARC, Chino, 1610, 21/08/2023
Euphorbia est le nom donné par Fraser, qui avait d’abord traité cette espèce comme une sous-espèce de A. extranea. Euphorbe, dans la mythologie grecque, est un des plus illustres guerrier troyen, mais encore une fois, il n’y a vraisemblablement aucun rapport… Rien dans la description originale (3) ne permet de comprendre pourquoi il l’a nommé ainsi ; je n’ai vu mentionné nulle part une quelconque affinité de l’espèce (de la ponte par exemple) pour les euphorbes.
Sur les photos de ces deux couples, les seules occasions où j’ai aperçu des femelles, on note leur variabilité ; comme très souvent dans ce genre, les femelles se présentent sous plusieurs formes, au moins une dite androchrome, l’autre dite terne.
Les 2 couples ont été photographiées sur le même ruisseau, le 16/08/2023, près de l’Amazon Research Center, près de Chino.
1- The Scientific Names of North American Dragonflies, Heinrich Fliedner, Ian Endersby – Busybird Publishing 2019
2- Damselflies of the genus Argia of the Guina Shield (Odonata : Coenagrionidae) – R. W. Garrison & N. von Ellerieder
3- Fraser, F.C. (1946) Notes on Amazonian Odonata in the Leeds Museum. Transactions of the Royal Entomological Society of London, 96 (2), 11–46.