Erythrodiplax solimaea est une rareté très peu photographiée ; avant les données de notre équipe, on ne trouvait qu’une seule photo sur Inaturalist. Nous l’avons observé sur les rives d’un grand étang, en forêt, à quelques kilomètres de l’Amazone. 2 individus voletaient assez rapidement de perchoirs en perchoirs.
À quelques dizaines de mètres, nous avons eu la chance de trouver le très rare Perithemis bella…
Ce sont 2 individus différents qui sont figurés sur les photos ci-dessus ; la coloration verte des yeux des sujets matures est vraiment étonnante et peu frérquente parmi les Erythrodiplax.
Erythrodiplax solimaea a d’abord été décrit par Ris (1) comme une sous-espèce de Erythrodipax ochracea, ce qui paraît surprenant quand on connaît cette autre espèce : l’étendue de la coloration alaire sur les ailes antérieures est très différente, la coloration des ptérostigmas, des yeux… Mais Ris a décrit cette espèce sur un sujet de collection, sans doute mal préservé (d’ailleurs, il mentionne que la coloration de l’abdomen est altérée).
Il mesure environ 35 mm, 22 pour l’abdomen.
Sur le site de l’IUCN sa distribution le limite aux zones de forêt du Pérou, du Venezuela et du Brésil. La seule donnée présente sur Inaturalist est en Équateur.
Erythrodiplax (2) (Brauer, 1868) du grec erythro, signifiant rouge et de diplax. Diplax (1840) est un nom de genre donné par Charpentier, formé par un préfixe signifiant deux ou double – et plax qualifiant quelque chose de plat, en accord avec la forme de la partie postérieure du pronotum présentant 2 structures semi-circulaires.
Charpentier ignorait que Newman avait déjà décrit ce genre sous le nom de Sympetrum (1833), et longtemps le genre Diplax est resté en usage ; aussi quand on a commencé à scinder ce genre, on a conservé le terme diplax dans des noms composés.
Pourquoi avoir qualifié ce Diplax de rouge ? L’explication est pour moi assez confuse ; disons que Kirby a retenu Erythrodiplax corallina, presque totalement rouge, comme l’espèce type du genre Erythrodiplax.
Pour le nom d’espèce, solimaea, j’en reste au stade des suppositions ; il est possible qu’il se réfère à la partie de l’Amazone, le rio Solimeo, comprise entre la triple frontière Brésil-Colombie-Pérou et la ville de Manaus. Tefé (autrefois Teffé), lieu de capture d’un des holotypes, est situé sur la rive sud du rio Solimeo, à 595 km à l’ouest de Manaus.
- 1- Ris, F. 1911. Libellulinen monographisch bearbeitet. Vol. 2. Collections zoologiques du Baron Edm. de Selys Longchamps, Catalogque systématiques et descriptif. Coll. Selys Longchamps 12: 385-528
- 2- The Scientific Names of North American Dragonflies, Heinrich Fliedner & Ian Endersby, Busybird Publishing, 2019.
Superbe, merci de nous faire partager ces espèces méconnues aux couleurs incroyables.
Une question, lorsque vous envisagez une étude dans un pays donné, qu’est-ce qui va guider votre recherche? votre choix des endroits où aller….etc ?
Bonjour, merci.
Dans notre équipe, ce n’est pas moi qui m’occupe des localisations, mais la technique consiste à retrouver les données dans la littérature lorsque l’on recherche des espèces très rares. Sachant qu’en général, on ne les trouve pas aux endroits où on les cherche…
Nous utilisons les données des réseaux sociaux, de science participative, Inaturalist, Observado…
Mais au Pérou, il n’y a à peu près rien et il faut taper au hasard. Il faut un guide local qui connaisse très bien la région, où sont les ruisseaux, les marais, les rivières, les étangs, comment y accéder. Impossible de s’en sortir seul, car il n’y a pas de carte et surtout pas de route, ce sont des régions inondées 6 mois de l’année. Certains jours, nous avons peu de succès, le lendemain est très riche.
Il faut de la chance ; une mare temporaire due aux pluies de la veille nous a fourni des espèces que nous n’avons jamais rencontrées ailleurs.