Lestoidea brevicauda n’a été décrit qu’en 1996, c’est une rareté. Mâles et femelles sont difficiles à séparer de leur cousin L. conjuncta. Ces photos sont donc présentées avec les réserves d’usage.
La photo ci-contre représente les appendices anaux du sujet ci-dessus.
L’identification des mâles se fait sur la longueur des appendices anaux inférieurs (clic sur image).
Ils sont courts pour L. brevicauda (comme son long l’indique), plus longs, plus visibles, plus acérés pour L. conjuncta pour lequel ils sont également plus rapprochés à leur insertion.
On trouve ici, publié dans « The species of Lestoideinae MÜNZ (Insecta: Odonata: Zygoptera: Lestoideidae) », G. Theischinger, un dessin des appendices anaux des 2 espèces que nous avons rencontrées.
C’est une petite espèce, comme L. conjuncta, il mesure environ 35 mm. Les 2 autres espèces L. lewisiana et barbarae sont plus grandes.
Son nom anglais est Short-tipped bluestreak. Si on comprend facilement que le short-tipped se rapporte aux appendices anaux inférieurs, le bluestreak est étonnant et se rapporte à la coloration bleue des immatures ; il est assez inhabituel d’utiliser les caractéristiques de sujets non matures pour donner un nom moderne. C’était plus commun dans les premiers temps de l’odonatologie ou les descripteurs travaillaient sur des exemplaires de collection, sans savoir si les sujets étaient matures ou immatures. Un bon exemple est notre Libellula fulva, francisée en Libellule fauve, le fauve étant la couleur des immatures.
Un autre sujet rencontré le même jour, sur le même lieu.
Pour les femelles, il faut se fier au pronotum et dans le même document de G. Theischinger, on trouve un dessin comparant celui des 2 espèces proches. Celui de la femelle Lestoidea brevicauda est arrondi ; même sur de bonnes photos rapprochées, qu’il soit arrondi, ou que cet arrondi soit brisé en son centre reste très difficile à apprécier…
Il faut donc garder à l’esprit que l’identification n’est pas absolument certaine.
Je suis cependant très confiant pour cette première photo. J’ai pris involontairement une image presque exactement sous le même angle que celle que j’ai trouvée par hasard, sur le Web, dans la 2° édition (2021) du « The Complete Field Guide To Dragonflies of Australia » par C. Theischinger et J. Hawking (je n’ai que la version de 2006). Celle-ci est bleue, mais semble bien mature ; elle deviendra sans doute jaune terne.
J’ai donc réalisé un montage collant ma photo de la femelle précédente à côté de celle du guide, et on peut constater la totale similarité, en particulier du pronotum.
Lestoidea brevicauda habite les ruisseaux et petites rivières de la forêt pluviale.
Sa distribution est très limitée, il est endémique du nord-est du Queensland, de Townsville au sud jusqu’à Cooktown au nord.
IUCN Red List
Atlas of Living Australia
Ci-dessous une autre femelle au pronotum bien arrondi, noter les taches jaunes sur le vertex qui sépare L. brevicauda et conjuncta des 2 autres espèces du genre (non contactées).
Lestoidea brevicauda femelle, Australie (FNQld), Little Crystal Creek, 15/12/2022
Lestoidea (1) est composé de Lestes et de oïdes, ce dernier utilisé comme suffixe, signifie apparence, aspect, pour indiquer que ce nouveau genre ressemble aux Lestes, ce que précise Tillyard : « Caractères intermédiaires entre ceux des légions des Lestes et des Protoneura).
Lestes (Leach, 1815), apparemment d’un mot grec signifiant voleur ou pirate, sans qu’on puisse expliquer la raison de ce choix étonnant.
Je me permets une hypothèse, sans doute ridicule aux yeux des linguistes, mais au moins chargée de sens ; pourquoi ne se serait-il pas directement inspiré du français leste, « qui se meut avec agilité et aisance » nous dit le Larousse. William Leach, entomologiste, entre autres, avait séjourné en France, connaissait bien le français, le lisait et avait tissé des liens assez étroits avec cette langue puisqu’en dépit de la guerre, il lisait les textes français, communiquait avec ses collègues français et s’en inspirait fortement.
Et que nos Lestes se meuvent avec facilité et légèreté dans les mouvements est une évidence 🙂
Brevicauda, du latin brevis pour court et cauda pour queue, ce qui se réfère aux courts appendices anaux inférieurs du mâle.
Lestoidea brevicauda femelle, Australie (FNQld), Crystal Creek, 03/12/2022
-1- The Naming of Australia’s Dragonflies, Ian Endersby & Heinrich Fliedner, Busybird publishing.