
Identification – Description
Ischnura elegans est vraiment très commun en France, sans doute la plus commune de nos libellules. C’est un petit zygoptère, un Coenagrionidae d’environ 32 mm.
Il montre de petites taches postoculaires rondes et des ptérostigmas en diamants, bicolores, ces deux éléments étant caractéristiques du genre.
Les mâles matures sont uniques pour leur coloration bleue limitée à la face dorsale de leur 8° segment abdominal. Aucun autre odonate en France ne montre cette caractéristique ; il n’y a que Ischnura pumilio, peu commun, qui montre un spot unique sur le 9° segment. Le lobe postérieur et médian du pronotum est nettement redressé en forme de dent, le 10° segment porte un important tubercule dorsal.
Ischnura elegans mâle, l’Agrion élégant en « français » est classiquement décrit, comme bleu, avec la face dorsale de son abdomen complètement noire, sauf S8, la face inférieure des segments 3 à 7 plus claire.
Le cas des femelles est plus complexe : il existe deux formes de femelles immatures (l’une bleu lilas, l’autre rosée ou orangée) qui donnent trois formes de femelles matures qui toutes montrent un spot coloré sur leur 8° segment.

Comportement – Écologie
Mâles et femelles ne s’éloignent guère de l’eau, l’accouplement peut être très long, jusqu’à sept heures (Steve Brooks, « Dragonflies ») ; s’il est certain que le mâle passe un certain temps à éliminer ou mettre de côté le sperme issu du précédent mâle s’étant accouplé avec sa partenaire, puis à transférer son propre sperme dans la bourse et la spermathèque de la femelle, une bonne partie du temps passé en position de cœur copulatoire semble occupé… à ne rien faire. Les femelles pondent dans les végétaux à la surface de l’eau sans que le mâle soit associé. Les œufs éclosent 10 à 20 jours après la ponte, la phase larvaire, qui compte 11 stades, dure quelques semaines dans le sud jusqu’à deux ans dans le nord de l’Europe ; l’espèce est au moins bivoltine dans une grande partie de notre pays (deux générations par an), et sans doute même trivoltine dans le sud, semivoltine dans le nord de l’Europe.
Les mâles, qui ne sont pourtant pas territoriaux, sont très agressifs et n’hésitent pas à s’attaquer à des zygoptères plus grands ou même à des anisoptères qui les dérangent. Selon mes recherches et les données que j’ai pu recueillir, si les Ischnura font partie du genre le plus souvent impliqué dans le cannibalisme, Ischnura elegans est le champion absolu de ce comportement avec, au 27 mai 2025, 22 cas documentés, soit 20% de tous les cas de cannibalisme entre zygoptères dans le monde.
Période de vol
L’immense étendue de son aire de répartition lui fait habiter des climats bien différents ; il apparaît donc très tôt dans le sud, dès la mi-mars, ne disparaît qu’en novembre, mais son pic d’activité se situe entre mai et août.

Habitat – Distribution géographique
Il accepte presque tous les milieux humides à l’exception des eaux acides et des eaux courantes rapides, il tolère la salinité. On est donc susceptible de le rencontrer dès qu’il y a un peu d’eau libre.
Il est présent partout en France (sauf en Corse où il est remplacé par I. genei) et en Europe, jusqu’en Corée du Sud et au Japon. L’Agrion élégant est cependant absent du sud de l’Espagne et du Portugal où il est remplacé par Ischnura graellsii.
Il est absent d’Afrique et d’Afrique du Nord, il est signalé en Iran et au Pakistan.
Les anglo-saxons le nomment Common Bluetail.
Atlas Dynamique des Odonates de France
Liste rouge IUCN.
Étymologie
Ischnura du grec « ischnos » – fin, et de « ura » – queue, soit abdomen pour les insectes. Le genre Ischnura renferme en France, en tout cas, des odonates parmi les plus fins.
Elegans du latin … « elegans » – élégant est plus évident et s’accorde bien à la silhouette commune, mais toujours plaisante, de cette petite espèce.
Ouvrages consultés :
– Daniel Grand et Jean-Pierre Boudot, Les Libellules de France, Belgique et Luxembourg, collection Parthénope, 2006
– Guide des Libellules de France et d’Europe, K. -D.B. Dijksta & R. Lewington, Delachaux et Niestlé, 2007
– Paul André Robert, Les Libellules, Delachaux et Niestlé, 1958
– Atlas of the European dragonflies and damselfies, Jean-Pierre Boudot & Vincent J. Kalkman, KNNV Publishing, 2015
– Europe’s Dragonflies, A Field Guide to damselflies and dragonflies, Dave Smallshire & Andy Swash, British Dragonfly Society, 2020
– R. R. Askew, 2004 – The Dragonflies of Europa – Harley Books
– Cahier d’identification des Libellules de France, Belgique, Luxembourg & Suisse, Daniel Grand, Jean-Pierre Boudot & Guillaume Doucet, Biotope, 2014
– Libellules d’Europe – Europe centrale et méridionale – G. Jurzitza – Delachaux et Niestlé – 1993
– J. d’Aguilar, J-L Dommanget, R. Prechac – Guide des Libellules d’Europe et d’Afrique du Nord – Delachaux & Niestlé, 1985